La recherche sur l'ADN ancien permet de mieux comprendre l'histoire des premières populations d'Afrique centrale et orientale

Une étude interdisciplinaire récemment publiée dans la revue Science Advances présente 20 anciens génomes récemment séquencés d'Afrique subsaharienne, dont le premier ancien ADN du Botswana, de l'Ouganda et de la République démocratique du Congo. Ces dernières données sont pour la plupart le résultat des recherches archéologiques menées par l'UGent sur l'ancien royaume du Congo (2012-2016), financées par le Conseil Européen de la Recherche (CER). La nouvelle étude contribue à une meilleure compréhension de la manière dont diverses sociétés africaines d'origines linguistiques et culturelles différentes ont interagi au Néolithique et à l'Age du Fer.


Pour découvrir les évolutions démographiques qui ont conduit à l'énorme diversité linguistique, culturelle et économique de l'Afrique, une équipe interdisciplinaire de chercheurs d'Afrique, d'Europe et d'Amérique du Nord a réuni des ADN anciens de différentes régions d'Afrique subsaharienne pour une étude comparative. Leur premier objectif était de tester les théories existantes sur l'histoire des populations de l'Afrique de l'Est et du Centre qui ont été élaborées sur la base de données ADN modernes, linguistiques et/ou archéologiques. Cette collaboration entre l'Institut Max Planck pour la Science de l'Histoire Humaine (MPI-SHH), les Musées nationaux du Kenya et plusieurs autres partenaires internationaux dont l'UGent a été menée par l'archéogénéticien Ke Wang et l'archéologue Steven Goldstein du MPI-SHH.


UGent a fourni quatre échantillons d'ADN ancien de la RDC provenant de squelettes découverts en fouille entre 2012 et 2015 dans le cadre d'un projet de recherche interdisciplinaire sur l'ancien royaume du Congo (kongoking.net) financé par le CER et réalisé en collaboration avec, entre autres, l'Institut des Musées Nationaux du Congo (IMNC) à Kinshasa. Selon Koen Bostoen, coordonnateur du projet, ces quatre échantillons sont d'une grande importance scientifique en eux-mêmes car ils sont parmi les premières données ADN anciennes publiées de la RDC. Dans l'étude de Wang et al. ils occupent également une place particulière car ce sont les échantillons les plus jeunes. Ils sont âgés de 200 à 300 ans et proviennent de deux sites (Kindoki et Ngongo Mbata) de la province du Kongo Central (ex-Bas-Congo) de la RDC. Les tombes en question ont été découvertes entre 2012 et 2015 sous la supervision de l'archéologue franco-britannique Bernard Clist. Alors que l’individu découvert à Ngongo Mbata a pu être un prêtre, à Kindoki les trois autres personnes sont vraisemblablement des nobles de la fin de l'ancien royaume du Congo. Fait remarquable, l'un d'entre eux était très probablement d'origine mixte afro-eurasienne. Cela confirme ce que les sources historiques nous disent également, à savoir que l'élite du vieux Congo était en partie luso-africaine.


Dans le cadre d'une étude plus large, l'ADN ancien de la RDC contribue principalement à étayer davantage la théorie selon laquelle les langues bantoues (le plus grand groupe linguistique de l'Afrique contemporaine) se sont répandues de la région frontalière entre le Nigeria et le Cameroun vers l'Afrique du Sud grâce à des migrations humaines au cours du néolithique et du début de l'âge du fer. L'ADN ancien de la RDC, qui provient très probablement de locuteurs du kikongo (bantou), est très proche de l'ADN ancien de l'Ouganda, de la Tanzanie, du Kenya et du Botswana, ce qui illustre une grande homogénéité dans le temps et dans l‘espace. La nouvelle étude montre que les agriculteurs bantouphones ont dû arriver au Botswana au cours du premier millénaire de notre ère, après quoi ils ont commencé à se mêler aux bergers d'origine est-africaine (Khoi) et aux chasseurs-cueilleurs locaux d'Afrique australe (San). Selon Koen Bostoen (BantUGent), qui dirige actuellement un autre projet interdisciplinaire de l'ERC sur l'expansion bantoue (www.bantufirst.ugent.be), cette nouvelle étude confirme que la migration initiale des communautés bantouphones à travers la forêt tropicale d'Afrique centrale du dernier millénaire avant notre ère a dû se produire très rapidement et a entraîné des changements très importants dans le paysage démographique, linguistique et culturel de l'Afrique subsaharienne.

Information sure la publication :  

  • Titre: Ancient genomes reveal complex patterns of population movement, interaction, and replacement in sub-Saharan Africa
  • Auteurs: Ke Wang, Steven Goldstein, Madeleine Bleasdale, Bernard Clist, Koen Bostoen, Paul Bakwa-Lufu, Laura T. Buck, Alison Crowther, Alioune Dème, Roderick J. McIntosh, Julio Mercader, Christine Ogola, Robert C. Power, Elizabeth Sawchuk, Peter Robertshaw, Edwin N. Wilmsen, Michael Petraglia, Emmanuel Ndiema, Fredrick K. Manthi, Johannes Krause, Patrick Roberts, Nicole Boivin, Stephan Schiffels
  • Publication: Science Advances
  • DOI: 10.1126/sciadv.aaz0183

Contacts:

 Pour UGent

Koen Bostoen
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